Michaël Mutzner – Les églises évangéliques deviennent partenaires de l’Armée Suisse
PHARE FM : L’armée suisse a signé un partenariat dans le domaine de l’aumônerie, avec les Eglises évangéliques, Michael Mutzner. C’est la première fois que l’armée signe un tel partenariat avec les Eglises évangéliques ?
Michaël : Oui absolument, c’est la première fois qu’un partenariat est signé entre les organisations faîtières évangéliques de Suisse allemande et romande, en l’occurrence, Freikirchen.ch et le Réseau évangélique Suisse et l’Aumônerie de l’Armée. Jusqu’à présent, l’aumônerie de l’Armée était réservée aux Eglises que l’ont appelle « nationales » : l’Eglise catholique romaine, l’Eglise catholique chrétienne et l’Eglise protestante réformée. Cette année donc, des aumôniers évangéliques rejoignent les rangs de l’armée suisse. Ils sont 7, sur les 36 nouveaux aumôniers de la volée 2020, à se former et entrer en service.
PHARE FM : Est-ce que les Eglises évangéliques sont les seules concernées par cette ouverture ? Qu’en est-il des autres minorités religieuses, comme les musulmans par exemple ?
Michaël : Pour le moment, seuls les évangéliques sont concernés, mais je crois que le changement de paradigme pour l’Armée est effectivement plus large. Il s’agit désormais de mieux tenir compte du pluralisme religieux présent en Suisse, et donc aussi, parmi les recrues. L’armée reconnaît que le paysage religieux a évolué et qu’elle se doit d’intégrer les différentes composantes spirituelles du pays. Pour Stefan Junger, chef de l’Aumônerie de l’Armée, c’est un tournant majeur, l’avènement (je cite) d’une « aumônerie militaire pour tous ». Pour lui c’est même un jour historique : « il n’y a jamais eu une telle rencontre dans l’histoire suisse”.
PHARE FM : Y a-t-il aussi d’autres motivations derrière la décision de l’Armée ?
Michaël : Oui, pour l’Armée, c’est aussi une façon de répondre à un autre besoin pratique. Le recrutement de nouveaux aumôniers est devenu difficile. L’arrivée de nouveau partenaires est nécessaire pour renouveler les effectifs. C’est ce que souligne aussi Jean-Luc Ziehli, président du Réseau évangélique suisse. Pour lui, c’est à la fois l’établissement d’une relation de confiance et le besoin de forces nouvelles, qui ont rendu ce partenariat possible.
PHARE FM : J’imagine qu’il y a aussi des attentes et des conditions précises pour la participation des aumôniers au sein de l’Armée ?
Michaël : Oui bien sûr, il y a aussi des responsabilités, et la formation obligatoire des aumôniers permet de poser clairement ces attentes. Les aumôniers ont avant tout un rôle d’écoute, de soutien et d’encouragement des militaires. Ce n’est pas un lieu d’évangélisation explicite et intentionnel. Mais cela reste néanmoins une formidable occasion de servir et d’offrir un témoignage de l’amour de Dieu, à travers une présence qui s’inscrit dans le respect du cadre fixé par l’Armée.
PHARE FM : Une bonne nouvelle donc, pour l’Armée, mais aussi pour les évangéliques ?
Michaël : Oui tout à fait, et je me réjouis aussi du message d’un tel partenariat vis-à-vis de la société. Les minorités religieuses, et notamment les évangéliques, souvent encore en marge de la société, mal compris et vu comme des « sectes » il n’y a pas si longtemps, sont aujourd’hui reconnue par une institution comme l’Armée. Cela le montre le chemin parcouru, de part et d’autre, pour surmonter les incompréhensions et la méfiance. Cela ouvre aussi des perspectives réjouissantes dans d’autres domaines, où la collaboration entre Eglises évangéliques et institutions publiques n’est pas encore aussi avancée.