Grain de Sel ou Grain de Poivre ? du 10 juin 2020 – Jean-Marc Bellefleur – Nous ne sommes pas racistes
Bonjour Jean-Marc Bellefleur !
Bonjour Lisa, bonjour Nathanaël, bonjour tout le monde ! Vous êtes raciste, vous ?
Quelle question ! Bien sûr que non, Jean-Marc.
Je m’en doutais, rassurez-vous. Je vous propose d’évoquer ce sujet, parce que la police des Etats-Unis en particulier est accusée de racisme. La maire de Minneapolis, là où ce pauvre homme, Georges Floyds, a été tué par la police, a annoncé qu’elle allait “démanteler” la police de la ville et la remplacer par un – je cite – “nouveau modèle de sécurité publique qui assure vraiment la sûreté de notre population” – fin de citation.
Cela témoigne d’un vrai malaise. En France aussi, des manifestations ont lieu contre le racisme dans la police…
Pour ce que je connais, je crois plutôt abusif de faire une comparaison entre la police de Minneapolis et celle des villes de France. On n’en est pas au démantèlement, ici. Mais ce n’est pas à dire que le racisme n’existe pas, dans la police comme ailleurs, et en France comme ailleurs.
C’est vraiment un sujet actuel, à votre avis ?
Hélas oui, mais il impose de regarder l’histoire. Revenons à Minneapolis : dans l’histoire des Etats-Unis, l’esclavage a occupé une certaine place. Cela peut expliquer, en partie bien sûr, le racisme actuel. Pas loin de là, moi qui connais un peu les Antilles françaises, je peux vous dire que la mémoire de l’esclavage y fait encore mal.
Je pense que l’esclavage, et plus généralement les rapports Nord-Sud, ont marqué durablement les relations entre humains de couleurs différentes.
Et vous ne dites pas “de races différentes”…
Comment je pourrais dire ça ? Il a une magnifique variété dans chez les humains. Le racisme consiste justement à prétendre qu’il y a des gens plus humains que les autres, qu’il y a des races. Et ce sont ces théories “racistes” qui ont fondé l’esclavage, et la colonisation, et plus généralement qui donnent aujourd’hui encore lieu à des fractures importantes dans certaines sociétés.
Le racisme peut devenir ordinaire, banal… c’est un genre d’ambiance tacite…
Oui… Tout à l’heure, vous avez répondu que vous n’étiez pas raciste. Tout le monde répond ça. Le problème, c’est le petit mot qui vient après : “Mais” (bon vous vous ne l’avez pas dit !) “Je ne suis pas raciste, mais je ne veux pas que ma fille épouse un Noir”; ou “Je ne suis pas raciste, mais je ne veux pas de locataire asiatique”, ou encore, parce que ça existe aussi, “Je ne suis pas raciste, mais je ne fais pas confiance aux Blancs”.
Il y a aussi des différences culturelles pas toujours faciles, non ?
Oui, c’est juste. La mondialisation provoque des chocs culturels en grand nombre, et la cohabitation entre personnes de cultures différentes n’est pas toujours évidente. Surtout quand on touche des domaines sensibles, comme les hommes et les femmes. Sans parler de religion !
Comment avoir une attitude juste alors ?
Je disais qu’il faut s’intéresser à l’histoire : la nôtre, celle des autres peuples. Être réaliste quant aux différences culturelles… et connaître sa propre culture, ses propres racines, pour d’autant mieux découvrir avec profit une autre culture. Un exercice intéressant, aussi : comprendre le regard que l’autre porte sur nous. Et puis, tout simplement, se souvenir de la “règle d’or” enseignée par Jésus : “Fais aux autres ce que tu voudrais qu’ils fassent pour toi.”
Merci Jean-Marc.