Grain de sel ou grain de poivre du 27 mai 2020 – Jean-Marc Bellefleur – Harcèlement de rue

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Grain de sel/poivre ?
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Grain de sel ou grain de poivre du 27 mai 2020 - Jean-Marc Bellefleur - Harcèlement de rue
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PHARE FM : Bonjour, Jean-Marc Bellefleur !

CHRONIQUEUR : Bonjour Lisa ! Bonjour Nathanaël ! Alors maintenant, on peut se promener dans la rue. En plus, c’est le printemps, avec les arbres qui fleurissent et les oiseaux qui font leur nid.

PHARE FM : Oui, on les entend chanter, siffler, ça fait plaisir !

CHRONIQUEUR : Oui, Lisa, mais aujourd’hui j’aimerais parler de drôles d’oiseaux, qui sifflent aussi, d’ailleurs.

PHARE FM : Quels oiseaux, Jean-Marc ?

CHRONIQUEUR : Il y a certains jeunes hommes qui ont la manie de siffler quand ils voient une jeune fille passer à la portée de leur regard avide, d’autant plus si elle ne s’est pas habillée avec un sac. Alors on pourrait imaginer qu’ils se sont pris la langue entre les dents, sous l’émotion du spectacle, mais non. Ce sifflement est délibéré, et ils ne vont pas s’arrêter là. Il y a le compliment, assez néandertalien, “vous êtes charmante” ; la demande, un rien intrusive, du numéro de téléphone (“Je peux avoir ton 06”), la proposition assoiffée, à tous les sens du terme, “tu viens boire un café”, et j’en passe.

PHARE FM : C’est ce qu’on appelle aujourd’hui le “harcèlement de rue”.

CHRONIQUEUR : Oui, et c’est un délit en France. D’autant plus que si le “drôle d’oiseau” est éconduit, il risque fort de changer de chant : combien de femmes, après avoir remis en place un importun lourdeau, ce sont fait copieusement insulter ! Le harcèlement de rue fait véritablement partie des violences faites aux femmes.

Or maintenant qu’on peut de nouveau aller et venir à sa guise, de nombreuses femmes se plaignent d’une recrudescence du harcèlement de rue.

Lundi dernier en France, la secrétaire d’État à l’Egalité femmes-hommes, Marlène Schiappa, a mis en place diverses mesures pour lutter contre ces violences dans l’espace public : des arrêts de bus à la demande, un dispositif permettant aux femmes de demander de l’aide dans des commerces…

PHARE FM : Et en Suisse, en Belgique ?

CHRONIQUEUR : Le problème existe visiblement aussi. Par exemple à Lausanne, il y a une application de téléphone pour signaler un fait, qu’on en soit victime ou témoin. Cela nous amène d’ailleurs à la responsabilité commune devant de tels comportements. J’ai lu un témoignage assez fort d’une jeune femme à Bruxelles, du même genre.

PHARE FM : On a l’impression qu’il y a des hommes qui regardent les femmes comme des proies…

CHRONIQUEUR : … Oui, et la rue comme un terrain de chasse ! Mais ces hommes-là ne savent plus voir. Ils ont l’oeil abîmé par le sexisme, et ne voient pas les femmes comme des êtres sociaux, leurs égales, mais comme des objets sexuels, sur lesquels ils auraient tous les droits. C’est une vision avilie de l’humanité ! Un homme peut trouver qu’une femme est jolie sans pour autant la réduire à sa plastique, non ? ça, je pense qu’ils ne l’ont pas compris. Qu’est-ce qu’ils ont compris, en fait, de l’humanité ?

PHARE FM : Et cela pose la question de la liberté de tous dans l’espace public. 

CHRONIQUEUR : Oui, enfin de la liberté de toutes ! Je rêve de rues dans lesquelles les femmes pourront aller et venir à leur guise, habillées comme elles le souhaitent, sans faire avoir à faire au registre lamentable des harceleurs.

PHARE FM : Oui en fait il y a encore toute une éducation à faire de beaucoup de garçons et d’adolescents.

CHRONIQUEUR : Encore et toujours, Lisa. Et cette éducation, je le dis toujours, elle commence dans nos foyers, dans notre voisinage, partout où nous vivons, et nous en sommes tous un peu responsables. Responsables, aussi, et les hommes en particulier, d’impulser en société le respect des femmes et le principe de leur égalité avec les hommes.

PHARE FM : Merci Jean-Marc