L’invitée du jour — Yvanna Goriatcheff interpelle les recruteurs sur l’urgence de valoriser l’expérience

L'invité du Jour
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L'invitée du jour — Yvanna Goriatcheff interpelle les recruteurs sur l’urgence de valoriser l’expérience
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Dans un contexte de pénurie de compétences et de tensions sur le marché de l’emploi, la place des seniors dans le monde du travail est interrogée. Sont-ils une nécessité économique ou bien une illusion sociale ? Comment les entreprises peuvent-elles mieux intégrer cette population souvent marginalisée ?
Aujourd’hui, j’accueille Yvanna Goriatcheff, directrice de Synergie Executive, experte en ressources humaines, recrutement et management de transition.

 

Dans un marché du travail marqué par une pénurie croissante de compétences, les seniors apparaissent comme un vivier de talents encore largement sous-exploité. Leur contribution, pourtant essentielle, reste trop souvent marginalisée, alors même qu’ils représentent plus de 30 % des actifs dans certains secteurs clés.

Cette mise à l’écart ne repose sur aucune logique économique viable. Bien au contraire, elle prive les entreprises d’un levier de performance et de stabilité. Les freins à leur maintien ou à leur retour dans l’emploi relèvent principalement de biais cognitifs persistants, qui alimentent des idées reçues sur leur capacité d’adaptation ou leur disponibilité.

Pourtant, les faits démontrent que les seniors sont tout aussi engagés et évolutifs que leurs homologues plus jeunes. Valoriser leur expérience sans tomber dans les stéréotypes liés à l’âge implique une transformation des pratiques managériales. Cela passe par une évaluation fondée sur les compétences réelles, une formation des recruteurs et des managers à l’intergénérationnel, et une culture d’entreprise inclusive, où chaque génération trouve pleinement sa place.

Les seniors représentent à la fois une nécessité économique et une opportunité stratégique pour les entreprises, notamment en période d’incertitude. Leur expérience, leur recul et leur fiabilité sont des atouts recherchés, mais encore trop souvent sous-estimés. Les marginaliser serait non seulement injuste socialement, mais aussi une erreur économique majeure. Les principaux freins à leur intégration relèvent de biais cognitifs tenaces, qui ne résistent pourtant pas à la réalité du terrain. Les seniors sont capables de s’adapter, d’apprendre et de contribuer pleinement, à condition qu’on leur en donne les moyens, notamment par la formation continue. Il est essentiel de recruter sur la base des compétences, en luttant activement contre les stéréotypes, et cela commence dès les cabinets de recrutement. Enfin, ne pas recruter un senior revient à discriminer, et la loi, comme l’éthique professionnelle, ne le tolère pas.

Repenser les parcours professionnels s’impose aujourd’hui comme une nécessité pour mieux intégrer les seniors dans les dynamiques de l’emploi. Cette révision globale passe par des dispositifs de formation adaptés, une plus grande flexibilité des conditions de travail et une reconnaissance accrue de l’expérience acquise. Dans un contexte de pénurie de talents, laisser une partie des seniors décrocher prématurément constitue un véritable gâchis de compétences. Leur savoir-faire, souvent irremplaçable, reste indispensable dans de nombreux secteurs en tension. L’enjeu n’est donc pas seulement social, il est aussi stratégique pour la performance des entreprises. La valorisation des profils expérimentés doit s’inscrire dans une logique intergénérationnelle, où chaque âge trouve sa place. C’est à cette condition que les organisations pourront répondre durablement aux défis du marché du travail.

Il est indispensable de repenser les parcours professionnels dans leur globalité, en plaçant la formation continue et la flexibilité au cœur des dispositifs. Cette flexibilité, plébiscitée par les entreprises comme par les salariés, constitue aujourd’hui un mode de collaboration vertueux et efficace. Laisser les seniors décrocher prématurément serait un véritable gâchis de compétences, surtout dans un contexte de pénurie de talents. Les secteurs en tension, comme la santé, le médico-social ou l’industrie, ont un besoin urgent de savoir-faire que les seniors détiennent. Ne pas mobiliser ces compétences revient à affaiblir la chaîne de valeur de l’entreprise, qui repose sur la complémentarité des générations. Les mentalités évoluent, et les entreprises prennent conscience que les seniors sont un maillon essentiel de leur performance. Face au recul de l’âge de la retraite, il devient impératif de s’emparer de ce sujet, et les cabinets de conseil ont un rôle clé à jouer pour accompagner ce changement.