L’invité du jour — Jonathan Peterschmitt défend la valeur intrinsèque de la vie humaine

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L'invité du jour — Jonathan Peterschmitt défend la valeur intrinsèque de la vie humaine
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Depuis plusieurs années, la question de la fin de vie suscite un débat profond en France, mêlant considérations éthiques, médicales, philosophiques et spirituelles. En mai 2025, l’Assemblée nationale a adopté deux propositions de loi majeures : l’une renforçant les soins palliatifs, l’autre ouvrant la possibilité d’une aide à mourir pour les personnes atteintes de maladies incurables, avec un pronostic vital engagé.
Cette évolution législative marque un tournant dans notre rapport à la mort, à la dignité humaine et à l’accompagnement des personnes en fin de vie.
Pour en parler, je reçois aujourd’hui le docteur Jonathan Peterschmitt, médecin généraliste engagé, également connu pour ses prises de position en tant que médecin chrétien.

 

La loi sur la fin de vie adoptée en mai 2025 introduit un changement majeur dans l’approche française de la mort médicalement assistée. Elle ne se contente plus d’encadrer l’accompagnement des patients en phase terminale, mais autorise désormais explicitement l’aide à mourir, que ce soit par suicide assisté ou par euthanasie, dans des conditions précises. Ce tournant législatif redéfinit les contours de l’intervention médicale en fin de vie.

Cette évolution marque une rupture nette avec la logique des soins palliatifs, qui visent à soulager la souffrance sans hâter la mort. Le cadre légal précédent, notamment la loi Leonetti, reposait sur une éthique de l’accompagnement. Désormais, la possibilité de provoquer la mort devient une option encadrée, ce qui modifie profondément la posture du soignant et la nature de la décision médicale.

Au-delà de l’aspect technique, cette loi soulève une interrogation éthique fondamentale : la valeur que la société accorde à la vie humaine, même lorsqu’elle est marquée par la souffrance ou la dépendance. Là où la dignité était autrefois considérée comme inhérente à toute existence humaine, elle semble aujourd’hui de plus en plus conditionnée à la qualité de vie perçue. Ce glissement culturel redéfinit les critères de ce qui est jugé « vivable » ou non, et interroge le socle même de notre humanité partagée.

La loi Leonetti encadrait déjà la fin de vie en France, en privilégiant l’accompagnement palliatif sans provoquer la mort. La nouvelle législation de 2025 marque un tournant en autorisant explicitement l’aide à mourir, par suicide assisté ou euthanasie. Ce changement introduit une rupture éthique : on passe d’un accompagnement vers la mort à une décision de la provoquer.
Cette évolution reflète un glissement culturel plus large, où la dignité humaine, autrefois considérée comme intrinsèque, semble désormais conditionnée à la qualité de vie. La valeur de la vie devient relative, dépendante du regard porté sur la souffrance et la dépendance.

Les réactions des aidants face à cette loi sont multiples et souvent contrastées, reflétant la diversité des sensibilités et des convictions personnelles. Dans le milieu soignant, notamment en soins palliatifs, cette évolution législative suscite des interrogations profondes sur le sens de l’accompagnement et sur les nouvelles responsabilités qui en découlent.

Pour un médecin chrétien, cette loi soulève également un enjeu de conscience. Elle impose de concilier les convictions spirituelles avec les possibilités désormais offertes par le cadre légal, dans un équilibre délicat entre foi, éthique médicale et écoute de la souffrance.

Enfin, cette réforme redéfinit en profondeur la relation de confiance entre le patient, ses proches et le corps médical. En introduisant la possibilité d’une mort provoquée, elle modifie les attentes, les peurs et les repères qui structuraient jusqu’ici cette relation fondée sur le soin, la protection et la non-nuisance.

Les réactions des aidants face à cette loi sont très diverses, mais dans le milieu des soins palliatifs, la majorité du corps médical reste opposée à la fin de vie provoquée. Pour ma part, j’estime qu’il faut aborder ces situations avec une extrême prudence. Nous sommes confrontés à des souffrances parfois insupportables, et cela exige de nous une profonde humilité et une grande compassion.

En tant que médecin chrétien, je m’efforce de rester à l’écoute de la souffrance tout en proposant un chemin de vie, même dans les derniers instants. Il reste toujours quelque chose à vivre, même dans la douleur, et cela mérite d’être protégé.

Je pense aussi que cette loi modifie profondément la relation de confiance entre le patient, ses proches et le soignant. En intégrant la possibilité de provoquer la mort, on remet en cause le principe fondamental du “primum non nocere”. Cela ouvre la porte à un glissement éthique dangereux, non seulement pour la relation de soin, mais pour l’ensemble de la société.